mardi 25 mars 2008

Mon rapport à la surdité

Je n'ai jamais vraiment réfléchi sur ce que représentait la surdité pour moi. A priori, c'est un handicap, quoi qu'en disent les sourds "extrémistes" qui le considèrent non comme un handicap, mais comme une identité (sic).
D'ailleurs, il suffit de se référer à la définition donnée par Wikipédia :
On nomme handicap la limitation des possibilités d'interaction d'un individu causée par une déficience qui provoque une incapacité, permanente ou présumée définitive et qui elle même mène à un handicap moral social ou physique.

Il n'y a rien à ajouter.

Oui, il y a une culture spécifique aux sourds, mais ce n'est pas la mienne. Ayant grandi dans le monde des entendants, leur culture est donc la mienne.

Comme je n'ai jamais eu de réels problèmes liés à ma surdité, j'ai très bien intégré le fait d'être sourde. Sans toutefois totalement l'assumer, surtout quand je me trouve confrontée à une situation qui me renvoie douloureusement à mon handicap.

Je n'ai pas de gros problèmes de communication, j'arrive à communiquer avec n'importe qui, tant qu'il articule un minimum.

Tout ce qui me pose problème, c'est les discussions en groupe. J'aurai beau faire du pied à la personne qui est censée me servir d'interprète pour qu'il me résume ce qui s'est dit, interrompre de temps en temps les gens pour rattraper le fil de la discussion, etc., à la fin, je finirai toujours par le perdre. C'est une situation très frustrante pour moi, et je réfléchis encore à la manière de contourner le problème, mais je n'en vois pas.

Et Dieu sait que si j'entendais, on m'entendrait.

Une autre situation extrêmement frustrante : le téléphone. Je rage de dépendre d'une autre personne, et ça m'embarrasse beaucoup de lui demander de téléphoner pour moi. La vie serait tellement plus simple si je pouvais tout faire moi-même. Il reste toujours les mails, mais dans l'administration, il faut souvent attendre 1 jour pour avoir une réponse, si ce n'est plus. Alors, il faut compter une semaine pour obtenir la réponse à ma question. Cela m'est déjà arrivé, et j'étais près de m'arracher les cheveux. Dire que parfois, c'est vraiment urgent...

Mais hormis ces deux situations qui me rappellent que je suis sourde, tout va bien pour moi. Je ne pense pas particulièrement à ma surdité.

8 commentaires:

Cléo a dit…

Je dirais que même quand on est entendant les discussions en groupe sont pénibles à suivre. A plus de 4-5 personnes, les gens parlent tous en même temps ou font des apartés entre eux et si on ne s'est pas fixé sur une discussion dès le départ on est largué.

Tu écris aussi "Et Dieu sait que si j'entendais, on m'entendrait."

Mais on t'entend déjà! Et drôlement bien du reste. Ce qui fait que l'on oublie parfois que tu n'entends pas bien.

Pouick a dit…

Je suis assez d'accord avec Aquarelle, on t'entend vachement bien comme tu es. ;) T'assures !

Et pareil. Les conversations de groupe sont pénibles aussi pour les entendants. Dès qu'on est assez nombreux pour engendrer des conversations parallèles, c'est foutu !

Gilla a dit…

Personnellement, pour moi, la surdité n'est pas un handicap. C'est surtout la société ou la situation qui handicape les sourds par manque d'adaptation ou avec une mauvaise adaptation... c'est pareil pour tous les autres types d'handicaps et même les gens qui sont officiellement non handicapés peuvent se sentir handicapé à un moment de leur vie ! Par exemple, un entendant ne connaissant pas la langue des signes qui se retrouve seul dans un groupe de sourds pratiquant la langue des signes... Hum ! Tu dis ne pas être "collée" à la culture sourde, mais je crois qu'au fond de toi, il y a une part de culture sourde, même si tu n'en est pas vraiment consciente et que pour toi, ce n'est pas de la culture sourde. Tu ne penses pas à ta surdité, mais elle sera toujours là pendant toute ta vie...Tu ne t'en rends pas compte, mais tu adaptes ta vie d'une manière générale en fonction de la surdité et c'est ça qui fait que tu ne penses pas à la surdité. Mais bien entendu, tu as la culture entendante comme tu dis, puisque tu as grandi parmi des entendants et je ne te contredis pas là-dessus, puisque c'est mon cas aussi (enfin pour l'adolescence en tout cas) mais il y a toujours une part de sourd qui est là en toi, dans le ventre. Voilà... J'espère que tu n'as pas mal pris certaines choses que j'ai dit et puis, tu n'es pas obligée d'être d'accord avec moi, mais bon, j'ai dit ce que je pensais... voilà. Bisous.

Zol a dit…

Tu as raison, j'ai une part de culture sourde, tu fais bien de me le rappeler, je l'avais oubliée :p

Cependant, pour ce qui est de la surdité qui ne serait pas un handicap, je ne suis pas d'accord avec toi :D

Pour commencer, si je dis par exemple que si le sourd ne peut pas entendre les oiseaux, ce n'est pas à cause de son environnement, c'est bel et bien à cause de sa propre surdité qui l'en empêche. (bon, après, avec les appareils, on peut, pour certains sourds :p).
Alors en ce sens, la surdité est un handicap, ce n'est pas l'environnement du sourd qui le rend handicapé.
Ce que l'environnement du sourd fait, c'est de lui renvoyer à la tête son handicap.

Après, je suis d'accord, les entendants ont la possibilité d'aider les sourds à intégrer un monde pour lequel la surdité n'est pas vraiment faite. Je m'expliquerai là encore à travers un exemple :p
Imagine un petit groupe d'anglais qui progresse au sein d'un gros groupe de français. Selon toi, question langue, c'est à qui de s'adapter ?

MAIS, cela ne veut en aucun cas dire que le plus gros groupe ne doit rien faire pour aider le plus petit groupe à s'intégrer. Au contraire. C'est leur rôle de leur tendre la main pour les aider. C'est leur rôle de nous aider à trouver des solutions pour pallier au manque créé par notre handicap.

En gros, tu dis : le monde n'est pas fait pour la surdité.
Et je dis : C'est l'inverse, c'est la surdité qui n'est pas faite pour ce monde.

Ceci dit, c'est très intéressant d'échanger avec toi, et tout ce que je viens de dire n'est que mon point de vue.

Je n'ai rien mal pris, et j'espère que toi non plus.

Bisous.

Gilla a dit…

Ce que tu viens de me dire, ce n'est pas faux. Je n'y avais pas pensé. Justement, c'est fait pour, les échanges... On n'apprend rien tout seul (ou presque mais faut voir les situations), sauf quand on parle avec d'autres gens.

Finalement je dirai plutôt que c'est un peu les deux... la surdité n'est pas faite pour ce monde mais ce monde n'est pas fait pour la surdité non plus. Disons que cela dépend de la situation dans ce cas-là.

Sinon, je dois avouer que je déteste le mot "handicap" parce que je le trouve très péjoratif.. c'est pourquoi je disais que la surdité n'était pas un handicap pour moi. Il y a des gens qui ne voient pas la surdité de la même manière, certains la voient comme une richesse, d'autres comme une maladie. Pour ma part, je ne la vois pas comme une maladie, mais une richesse.

Cependant, il est vrai qu'être sourd, ce n'est pas tous les jours facile car il faut sans cesse se battre, toujours chercher à s'adapter et tout... C'est parfois fatiguant =). Enfin, tu le sais ça, toi.

Zol a dit…

Oui, en fait, en réalité, ce monde n'est fait pour à peu près personne, qui n'a jamais dit "Monde de merde" ? :p

Cependant, même si je suis d'accord avec toi sur le côté péjoratif du mot "handicap", il veut dire ce qu'il veut dire... J'en ai donné la définition d'après Wiki, d'ailleurs :D
Moi-même, je n'aime pas trop me dire handicapée, d'ailleurs, je le dis rarement. Mais je le suis... Ce n'est pas une maladie non plus. Je suis d'accord sur le fait que c'est une richesse, toutes les différences sont des richesses. Et beaucoup de personnalités se sont construites à cause, ou plutôt grâce à leur handicap.

Qui sait ce que nous serions si nous n'avions pas été sourdes ?

Gilla a dit…

Monde de merde ! \o/

Moi même je ne me dis jamais handicapée... Mais je pense qu'il faut bien savoir ce que ça veut dire et aussi le côté non handicapant concernant la culture sourde, les richesses, etc parce qu'il y a des sourds qui ne comprennent pas bien et qui confondent, ils ne comprennent pas leur statut.. parce qu'ils ont des allocations pour handicapés (enfin ça c'est en Belgique, je ne sais pas si c'est le cas en France aussi) donc bon, il y a plein de sourds qui se disent malheureux et ça, ça m'emmerde. Y a aucun rapport, mais j'espère que tu vois ce que je veux dire par là... Pour moi, les allocations d'handicap, cela me permet de payer les interprètes et autres professionnels qui s'occupent de moi, achat d'appareils, de piles, etc. Mais y a des sourds qui pensent que ce n'est pas ça, juste parce qu'on les prend pour des handicapés, on a pitié d'eux, tout ça quoi et qui ne travaillent pas parce que soi-disant, ils sont handicapés et qu'ils reçoivent des allocations. Pfiou !

C'est clair qu'être sourd, ça forge le caractère, ça construit en partie la personnalité. On ne voit pas notre vie sans la surdité... enfin bon, en même temps, c'est normal.

Zol a dit…

Ah oui, les boulets :p

Ceux qui se plaignent MAIS en même temps profitent du système en se reposant sur leurs allocations (en France aussi, on en a).

Ils sont gonflés. Mais j'en ai malheureusement rencontré beaucoup des comme ça.